Portrait : Amine Boufane

Portrait d’Amine Boufane, 2e dan UFA (Aïkido club de Allinges, ligue ARA), nommé ambassadeur FFAAA auprès du groupe de travail jeunes de l’IAF en septembre 2024.

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Amine Boufane, j’ai 27 ans et je suis pratiquant d’Aïkido. Je suis né à El Jadida, au Maroc, où j’ai découvert très tôt ma passion pour les arts martiaux. Mon père, Brahim Boufane, a été mon premier enseignant, et c’est grâce à lui que j’ai commencé mon parcours martial, vers l’âge de 4 ou 5 ans. Il m’a encouragé à explorer diverses disciplines, et très jeune, j’ai pratiqué l’Aïkido et le Taekwondo. Durant mon adolescence, j’ai diversifié mon approche en expérimentant d’autres arts martiaux comme le Full Contact, le Muay Thai, le Yoseikan Budo et le Jiu-Jitsu Brésilien, tout en maintenant l’Aïkido au cœur de ma pratique.

J’ai eu la chance d’être formé par plusieurs senseïs tout au long de mon parcours. Mon père a été mon influence principale, mais j’ai également passé plusieurs années à m’entraîner avec Ahmed Belarhzal, son premier élève et senpai, qui m’a transmis une approche différente de l’Aïkido. Plus tard, j’ai eu l’honneur d’être guidé par Takeo Nishiyama senseï, qui nous enseigne un Aïkido puisant directement à sa source japonaise, et en parallèle, j’étudie le Iaido de l’école Toyama-Ryu. J’ai toujours été animé par la découverte des différentes approches d’aiki, ce qui m’a poussé à visiter de nombreux dojos et à m’entraîner sous la direction de senseïs que je ne connaissais pas. J’ai probablement participé à des centaines de stages dans diverses écoles et pays, et je continue à apprendre quotidiennement.

Aujourd’hui, je suis un enseignant breveté, 3ème DAN Aïkikai, et j’ai la chance de pouvoir transmettre les valeurs de l’Aïkido a des pratiquants passionnés, notamment au sein de la MJC Allinges. Mon engagement pour cette discipline va au-delà de l’enseignement : je suis également créateur de contenu, avec une chaîne YouTube et je présente un podcast dédié à l’Aïkido, Aiki Talk, qui a pour objectif de rendre cet art martial accessible à un plus large public. Et depuis quelques jours, je suis un des ambassadeurs de notre fédération auprès de l’IAF.

Pourquoi avoir candidaté au poste d’ambassadeur de la FFAAA ?

J’ai décidé de candidater au poste d’ambassadeur de la FFAAA auprès de l’IAF pour plusieurs raisons qui tiennent à la fois de mon engagement pour l’Aïkido et de ma volonté de contribuer à son rayonnement international. Ce rôle représente une opportunité unique d’agir à une échelle plus large pour attirer les jeunes générations vers cet art martial, tout en mettant en avant ses valeurs fondamentales.

Mon parcours dans l’Aïkido a débuté très tôt et m’a permis de développer une pédagogie adaptée aux jeunes. J’ai toujours été motivé par l’idée de transmettre les techniques martiales ainsi que les valeurs humaines qui sont au cœur de l’Aïkido. Cela s’est concrétisé par ma participation à divers projets internationaux et locaux, notamment avec la Fondation Aikikai Maroc.

Dans ce contexte, devenir ambassadeur pour la FFAAA est un prolongement naturel de mon engagement. Ce rôle me permettra de représenter la fédération auprès du groupe de travail jeunes (YWG) de l’IAF et de travailler sur des initiatives qui attirent et fidélisent la jeunesse à l’Aïkido. L’un des aspects les plus stimulants de cette mission est l’opportunité de proposer des projets innovants, que ce soit à travers l’animation de stages, la création de capsules vidéo pédagogiques, ou encore la participation à des événements internationaux.

De plus, mon expérience en communication, notamment à travers la production de contenu, me donneront les moyens de représenter efficacement la FFAAA au sein de l’IAF. J’espère ainsi pouvoir contribuer à la diffusion de l’Aïkido auprès d’un public international et à l’atteinte des objectifs fédéraux.

Enfin, la dimension internationale de ce poste, avec la possibilité d’intervenir à l’étranger tout en gardant un lien fort avec les territoires métropolitains et ultramarins, correspond parfaitement à mon souhait de promouvoir les valeurs de l’Aïkido tout en renforçant les échanges entre différentes cultures. Mon rôle d’ambassadeur me permettra donc de contribuer de manière concrète à la pérennité et au développement de l’Aïkido à travers le monde.

crédit : @sous.nos.yeux
Vous avez créé un podcast sur l’Aïkido, pourquoi n’est-il pas en français et de quoi parle-t-il ?

Mon podcast Aiki Talk est un projet qui me tient à cœur depuis longtemps. L’idée est d’explorer des sujets variés liés à l’Aïkido, tels que son évolution historique, les différentes écoles, les défis auxquels font face les pratiquants, ainsi que des histoires inspirantes de persévérance et de réussite. 

Mon objectif est de rendre l’Aïkido plus accessible en offrant une compréhension simple de cette discipline, tout en encourageant un plus grand nombre de personnes à s’y engager. Pour cela, j’invite des experts en arts martiaux ainsi que des pratiquants d’autres disciplines pour enrichir les discussions.

J’ai décidé de lancer ce podcast en darija (arabe marocain) pour rendre le contenu accessible à un public local et régional, qui n’a pas beaucoup de ressources dans sa propre langue sur cette discipline. Ce choix permet d’atteindre des pratiquants marocains et arabes qui ne maîtrisent pas forcément le français, tout en valorisant notre patrimoine culturel. J’ai eu la chance d’y inviter des figures importantes comme Rachid Alaoui, fils de M’Barek Alaoui Shihan, et d’autres grands senseïs comme Abdelmajid Mihil, pour partager leurs expériences et visions de l’Aïkido au Maroc et au monde.

Le choix de la langue permet de rendre hommage aux générations de pratiquants qui ont contribué à l’essor de cet art martial au Maroc, notamment sous l’influence de M’Barek Alaoui Shihan, une figure centrale dans l’histoire de l’Aïkido en Afrique et le monde Arabe. Cela permet aussi d’ouvrir des discussions autour de l’Aïkido au sein du monde arabe, où cette discipline est en plein développement.

Cependant, je prépare déjà une saison en français qui sera bientôt annoncée, afin d’élargir l’audience et d’offrir un contenu plus diversifié à ceux qui s’intéressent à l’histoire et aux valeurs profondes de cette discipline.

Quelles sont vos ambitions ou votre vision pour la jeunesse en Aïkido ?

Mon ambition pour la jeunesse à travers l’Aïkido va bien au-delà de la simple transmission de techniques martiales. Je souhaite que les jeunes puissent trouver dans cette pratique un véritable outil de développement personnel. L’Aïkido, par ses valeurs de respect, de maîtrise de soi, de non-violence, et de coopération, offre un cadre idéal pour aider les jeunes à se construire. Mon objectif est de créer un environnement où ils peuvent apprendre à gérer les conflits, à se connaître eux-mêmes et à développer leur résilience face aux défis, tant sur le tatami que dans la vie de tous les jours.

L’Aïkido est un art de vivre autant qu’un art martial, et je veux que la jeunesse s’approprie cette philosophie. Mon rêve est que ces jeunes pratiquants trouvent dans l’Aïkido une source de plaisir, d’accomplissement personnel, mais aussi une manière d’affronter les difficultés de la vie avec sérénité. Je souhaite également encourager la transmission de ces valeurs aux générations futures.

crédit : @sous.nos.yeux
Que faudrait-il faire selon vous pour que l’Aïkido soit attractif auprès des jeunes ?

Pour rendre l’Aïkido plus attractif auprès des jeunes, plusieurs axes d’amélioration peuvent être envisagés, en commençant par une adaptation pédagogique. Il est essentiel de concevoir des programmes spécifiquement dédiés aux enfants et aux adolescents, qui mêlent progression technique et approche ludique. Les jeunes se désengagent souvent parce qu’ils ne trouvent pas leur place dans des cours ou ils sont traités comme des adultes ou qu’ils ne parviennent pas à suivre la dynamique des pratiquants plus expérimentés. La formation des enseignants doit ainsi intégrer des compétences en pédagogie spécifique, les rendant plus patients et attentifs aux besoins des jeunes pratiquants.

Ensuite, l’organisation d’événements tels que des stages dédiés aux jeunes est un levier puissant pour renforcer leur engagement. Il serait pertinent de multiplier ces événements peu présents dans le calendrier. Aujourd’hui, j’ai eu la chance de participer à quelques évènements avec la commission jeunes, animés par Fabrice De Ré qui est un excellent référent en matière de formation d’enseignement. Ces stages ont été très bien accueillis par les participants et les jeunes adorent quand c’est concentré sur eux. On peut également organiser des stages intergénérationnels, où les jeunes peuvent interagir avec des pratiquants plus expérimentés. 

Un autre excellent événement était le séminaire international de Cranves-Sales, organisé par le club de Monique Girardoz, qui a réuni des pratiquants français, suisses et italiens. En réunissant des pratiquants de différents horizons, ces stages leur permettent de découvrir l’Aïkido sous de nouvelles perspectives.

Un autre aspect crucial est la modernisation de notre communication. Les jeunes générations sont de plus en plus attirées par des contenus visuels et dynamiques. L’utilisation des plateformes numériques pour diffuser des vidéos, tutoriels ou démonstrations permettrait de rendre l’Aïkido plus visible et de montrer sa pertinence dans le monde moderne, tout en restant fidèle à ses valeurs fondamentales.

Enfin, un aspect souvent négligé dans l’enseignement de l’Aïkido est l’importance de la condition physique. Bien que cet art martial ne comporte pas de compétition, il est crucial que les pratiquants maintiennent une forme physique optimale. Cela contribue non seulement à une meilleure pratique martiale, mais aussi à un esprit sain dans un corps sain. Je pense qu’il serait bénéfique d’intégrer, de manière plus régulière, des stages ou des cours dédiés à l’entretien physique, au renforcement musculaire, au travail des ukemis (chutes), ainsi qu’au cardio. Ces initiatives non seulement améliorent la forme physique des jeunes, mais les rendent plus réceptifs aux exigences corporelles de la pratique martiale, tout en renforçant leur plaisir à pratiquer l’Aïkido.

crédits : @sous.nos.yeux
Vous avez assisté à votre première réunion en ligne pour l’IAF, quels sont vos premiers ressentis ?

Mes premiers ressentis sont très positifs. J’ai été impressionné par l’ouverture d’esprit et la collaboration entre les membres de l’IAF, ainsi que la volonté commune de faire avancer l’Aïkido auprès des jeunes. J’ai également apprécié la diversité des points de vue et la richesse des échanges, qui sont une source d’inspiration pour moi. Cette réunion m’a confirmé que l’Aïkido a un potentiel énorme à exploiter à l’échelle mondiale, et que nous avons un rôle essentiel à jouer pour promouvoir et développer cette discipline. 

Le développement de l’Aïkido en France est d’ailleurs souvent perçu comme un modèle à suivre pour d’autres pays, chose qui a été dite lors de cette réunion. Bien que nous soyons déjà sur une bonne voie, je pense que nous avons encore une marge de progression pour faire encore mieux et continuer à innover.